Discussion libre, riche et intéressante autour du livre et du film issu du roman que la plupart d’entre nous avaient vu. Le livre, dans son ensemble, a été beaucoup plus apprécié que le film jugé extrêmement sombre. Ce film dont il manque de nombreuses anecdotes mais qui retrace relativement fidèlement le livre à quelques différences près, n’est ni vraiment un western, ni un film intimiste, mais une parodie de western, et n’a pas eu beaucoup d’échos. Cela montre la difficulté d’adaptation cinématographique d’un roman.
Le roman, conte picaresque et évolutif, au style western dépouillé, est très réaliste et en même temps suscite l’imaginaire et ouvre au fantastique. Il devient savoureux si on prend la violence au deuxième degré et si on se laisse emporter par les descriptifs de la nature et les anecdotes succulentes. Deux parties s’en dégagent. La première partie relate les épopées des 2 frères, tandem tueur, brut de décoffrage, à la recherche de Warm, tout au long de nombreux chapitres, pas très longs, avec à chaque fois des aventures. La deuxième partie est centrée sur la rencontre puis l’association avec Morris et Warm, un autre tandem, plus évolué, scientifique, à la recherche de l’or. Et rien ne se passe comme prévu !
Charlie, le cadet, a tué le père, emmené la mère à l’hôpital, soigné Elie de l’insolation, prend les rênes en main, c’est lui qui traite avec le Commodore, manifeste son autorité. Et tout au cours du roman un basculement s’opère dans cette fratrie et progressivement Elie reprend son rôle d’aîné et tuera le Commodore, père de substitution et ramènera Charlie à la maison. Ce sont deux personnalités opposées : Elie, le conteur, tout en nuances, au physique ingrat, peu ragoûtant, voir dégoûtant et pourtant délicat, touchant, empathique avec son cheval, parfois très tendre avec son frère et les femmes qu’il aime sans espoir alors que Charlie, tueur absolu et fier de l’être, rêve de remplacer le Commodore puis qui avoue avec tant de délicatesse le meurtre de son père à son frère. La relation très forte et très fouillée des deux frères est particulière. Cette alternance de rivalités et de loyautés, constellée de chamailleries, d’agaceries, d’asticotages et de réconciliations, est le symbole du fonctionnement de la nature humaine et quelles que soient les époques, c’est intemporel et universel ! les relations humaines ne sont pas un long fleuve tranquille !
Ce périple à travers l’Oregon vers la Californie, dans de grands espaces, en utilisant le cheval comme moyen de transport est foisonnant de détails qui montrent les comportements de ces hommes, leurs nombreuses rencontres dans la nature ou dans les saloons, un monde particulier où il est difficile de trouver sa place : une époque et un pays ardus ; la ruée vers l’or ; l’importance des chevaux ; les prostituées ; l’alcool ; l’argent ; la saleté ; l’ironie. Tous ces éléments représentent des métaphores ou des symboles.
L’importance de la violence très prégnante et accentuée est esthétisée dans le film. L’humour noir présent dans le livre mais non dans le film, la rend plus supportable et donne de la légèreté. Cette bestialité naturelle parfois jusqu’à la jouissance, sans état d’âme, sans morale et sans conscience, est banalisée et inscrite dans l’histoire américaine. Mais le livre se termine par une rédemption, ils rentrent au bercail et retrouvent leur mère : par la force des choses pour Charlie qui perd sa main, son outil de travail, et pour Elie par prise de conscience et envie de vie rangée. D’adolescents niais ils deviennent des adultes conscients, symbole de la loi en gestation, de l’évolution de la société.
Certains ont été dérangés par trop de violence récurrente, l’atmosphère sombre, la banalisation du bien et du mal, l’exagération, des scènes caricaturales, la parodie de western. Les deux chapitres « Intermède » nous ont laissé perplexes !
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