« Le meurtre du Commandeur  » Tome 1&2 Haruki Murakami

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Haruki Murakami est un des auteurs japonais les plus traduits et les plus lus dans le monde. Quand je l’ai découvert avec « Kafka sur le rivage », je le décrivais comme un auteur de la banalité des gestes quotidiens qui finit par nous transporter dans un monde onirique sans qu’on s’en soit rendu compte. Je n’étais pas allée encore au Japon, et cet univers si particulier me fascinait.

Ici avec « Le meurtre du Commandeur » , il ne déroge pas à  ce qui fait sa marque de fabrique,  2 fois quatre cents  pages, il y a inévitablement quelques longueurs et quelques dialogues inutiles. Mais le charme opére toujours.

Le personnage principal  qu’on appelera narrateur car son prénom n’est jamais cité, est un jeune homme dans la trentaine , qui après six ans de mariage, se voit signifier par sa femme une demande de divorce. Pour gagner sa vie il peint des portraits mais avec une méthode très particulière car doté d’une mémoire visuelle exceptionnelle, il n’a pas besoin de faire poser le sujet. Il cherche cependant à le rencontrer pour pénétrer son âme et faire ensuite ressortir ce qu’il a ressenti. Ses portraits lui valent une bonne notoriété mais qui ne le satisfait pas .   Quand sa femme  lui demande de quitter la maison, il s’exécute sans protester, il annule son contrat avec son agent et part dans sa vieille voiture au nord du pays . A près quelques mois d’errance , son compte en banque commençant sérieusement à diminuer, il se résout à appeler un ami  d’études de l’Ecole des Beaux Arts , fils d’un peintre célèbre, Tomohiko Amada qui a fait revivre l’art du nihonga. Heureuse opportunité, son ami lui propose d’occuper la maison de son père parti en maison de retraite et atteint d’un début de démence. L’idée le séduit, la maison est isolée , sur une montagne, dans un grand parc, au dessus de la mer du Pacifique, il espère retrouver une inspiration pour de futurs tableaux. Il trouve rapidement des cours de peinture et parmi ses élèves, quelques amantes de passage. Quand son agent l’appelle un jour  pour lui proposer un contrat ,un portrait d’un homme riche , il hésite un peu et finit par accepter l’offre alléchante.

 L ‘homme en question s’appelle Mishiki , il habite la colline en face , de la terrasse, le narrateur aperçoit sa superbe maison blanche. Il est intrigué par cet homme mystérieux , belle prestance et belle allure à la chevelure flamboyante blanche et toujours superbement habillé à la mode . Ainsi naît  une relation amicale entre les deux hommes. Le narrateur découvre au grenier un étrange tableau visiblement inconnu au répertoire de Tomohiko Amada nommé » Le Meurtre du Commandeur » et qu’il considère comme un chef d’oeuvre. Le tableau représente une scéne violente du meurtre d’un vieillard qui lui rappelle Don Giovanni de Mozart. Cette peinture obsède le narrateur, pourquoi est elle cachée ? La suite tentera de répondre à la question. Surgissent alors quelques phénoménes bizarres, une clochette qui s’agite au milieu de la nuit, un personnage énigmatique, de 60 cm, au vocabulaire étrange qui semble s’être échappé du tableau. Les personnages et tous les éléments sont en place ,  l ‘imagination de Murakami peut s’exprimer.  Reste au lecteur à assembler les éléments du puzzle comme bon lui semble.

Le sous titre du 1er tome s’appelle ‘L’idée apparait » . C’est le rôle attribué à ce petit personnage qui n’est visible que du peintre et disparait aussi vite qu’il apparaît.

Dès le 2ème tome au sous titre « La métaphore se déplace » , la jeune fille dont le peintre fait le portrait disparait. Commence alors  pour le narrateur une véritable expédition pour la retrouver. Quels liens entre cette jeune fille et Mishiki ? Le peintre est –il le jouet de Mishiki ? Il est troublé par cette ado qui lui rappelle sa petite soeur,  dont la mort  l’a profondément affecté et qu’il évoque sans cesse dans ses souvenirs .

« Telle qu’elle était là, on aurait dit qu’elle dormait paisiblement. Et que si on avait légèrement fait bouger son corps, elle se serait aussitôt levée. Mais c’était une illusion. On aurait eu beau l’appeler, la secouer tant et plus, plus jamais elle ne se réveillerait…. je ne voulais pas que le corps frêle de ma petite sœur soit ainsi enfourné dans une boîte aussi exiguë. Il aurait dû être allongé dans un espace infiniment plus vaste. Par exemple au milieu d’une prairie. Et nous aurions dû aller la voir, sans dire un mot, nous frayant un chemin à travers de hauts herbages touffus. Le vent aurait soufflé en une douce brise sur les champs, et aux alentours, les oiseaux et les insectes auraient chanté ensemble de leur voix sans apprêt…. Mais dans la réalité, elle avait été placée dans un cercueil minuscule. »

Murakami adore jouer sur ces zones entre rêve , réalité  , les associations , séme des éléments destinés à nous mettre sur la voie de ses questionnements . Quand le narrateur se souvient de l’épisode de la grotte, est ce en référence à l’allégorie de la caverne de Platon ? Et cette insistance à rappeler le Bien et le Beau

« Dans notre vie, il est fréquent de ne pas pouvoir discerner la frontière entre le réel et l’irréel. Et il me semble que cette frontière est toujours mouvante. Comme une frontière entre deux pays qui se déplacerait à son gré selon l’humeur du jour. Il faut faire très attention à ces mouvements. Sinon, on finit par ne plus savoir de quel côté on se trouve »

Extraits choisis pour avoir une idée du texte et des obsessions de l’auteur

Divagations autour de la notion de vérité

Menshiki «  La vérité précipite parfois les hommes dans une solitude insondable » «  Vous ne recherchez donc pas la vérité toute nue ? » «  Plutôt qu’une vérité inébranlable, je choisis une possibilité qui pourrait éventuellement osciller.Je choisis de me laisser bercer par cette oscillation.Vous trouvez cette idée peu naturelle ? »

Scènes érotiques

« Là je suis seule dans la voiture. Je te téléphone avce mon portable…..  j’aimerais que tu sois ici en ce moment et que tu me prennes par derrière.pas besoinde préliminaires, je suis déjà bien mouillée, et puis j’aimerais que tu y ailles de bon coeur » « ca me plait, mais la Mini c’est un peu petit, non ?….. »Comemnt es tu habillée ?… selon ce que tu portes je m’adapterai … par l’intermédiaire de la ligne téléphonique, ce fut une véritable étreinte, c’tait la première fois que je faisias ce genre de chose, ce qu’lle me décrivait me stimula terriblement et les actes pratiqués dans le monde l’imagination furent plus sensuels que les véritables charnels ? Ses mots étaient parfois extrêmement directs, parfois allusivement érotiques. A l’issue de cet échange verbal, j’éjaculais. .. nous restâmes un moment sans parler à retrouver notre souffle.. »

Univers entre réel et irréel

« Pas de doute, ce bruit s’insinuait par les intervalles entre les pierres. .. le bruit que nous avons entendu venait-il du même endroit , ? me demanda t il à voix basse . Du même endroit , on dirait que quelqu’un , sou s ces pierres fait sonner ce qu’il semble être une clochette. J’approuvai, j’étais rassuré de savoir que je n’étais pas fou et , en même temps, je ne pouvais nier que les mots de Menshiki avaient bel et bien transformé l’irréalité suggérée jusque là comme possible en une rélaité, provoquant par conséquent un léger décalage dans la jointure des mondes …

Je ne sais pas si j’ai donné envie au lecteur de se plonger dans la lecture, pour moi si elle fut un peu poussive au début, elle devint très vite addictive jusqu’au mot FIN du tome 2.

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