Un roman parfait pour un club de lecture tant il est riche en thèmes de discussion..

 « Au fond du coeur, j’avais bien comme tous les autres sans doute un fil pour suivre ma route mais il ne m’a servi à rien ». Les gens dans la vie prennent le contrepied de ce qu’ils prônent »

Ces deux phrases résument la trajectoir du narrateur, nonagénaire qui au terme de sa vie écrit une  longue lettre  à Helga, chérie pour certaines d’entre nous, aimée bestialement pour d’autres .

Bjarni Gislason de Kolustardi fut un éleveur de moutons viscéralement attaché à ses racines (9 générations avant lui) , à sa ferme et à ses engagements malgré un e forte attraction physique, charnelle, à sa voisine Helga , sa femme renue acariâtre après une opération qui la rendit stérile. A la vieillesse, les filtres sociaux  tombent, plus rien n’a d’importance, ses proches sont tous morts y compris Helga à qui il dédie cette longuel ettre pour s’alléger de son fardeau  avant son passage pour l’au-delà, instant vérité. Une analyse fine et percutante.

Pour Daniéle , c’est un hymne à l’amour, à la souffrance cet  homme a tout fait à l’envers, toute sa vie, toujours en retard sur ses décisions, son destin lui a échappé.  Il ne réagit pas aux appels d’Helga, se voit privé de sa paternité, envoie une lettre alors que sa destinataire n’est plus de monde.

Nelly y voit une vie de désir et de frustration,  il se meurt de désir pour Helga mais se sacrifie pour sa femme rendue acariâtre par son accident. Cette vie de sacrifice a agacé Hélène qui n’a pas compris cette abnégation qu’il s’est imposé tout au long de sa vie. « Je suis le pire de tous, Je t’ai peut être aimé »

Au delà de ces commentaires sur le personnage principal, unanimité sur le plaisir de lecture.

 Si on devait résumer ce court roman ( 130 pages), ce serait « bestial et émouvant »

Emouvant car il expose des regrets qui n’en sont pas vraiment se demandant sans cesse ce qui l’a fait fuir, masochisme ou crainte de ne pas l’aimer suffisamment pour sacrifier sa vie rurale pour aller inconnu dans la capitale et  y vivre au quotidien.  Emouvant aussi par l’attachement de Bjarni à sa terre qui’il n’envisage pas de quitter , fut ce pour l’amour d’une femme. Il défend une Irlande ancestrale et pourtant rude et isolée.

« Ici à la campagne , j’ai eu de l’importance… ca ne les dérange pas , les gens des villes , de ne pas être en prise avec le monde,  y a -t-il rien de plus terrible que d’attendre que la vie s’écoule ?et puis ils écrivent des livres sur la froidure et la solitude des villes. Pourquoi donc ont ils quitté la campagne ?  je ne veux pas dire que tout est tellement merveilleux par ici, ni que les gens sont des anges. Bien sûr il y a les ragots, la jalousie… mais ces gens à vous dépanneront … c ‘est ici au pied de la colline qu’il fallait que je reste, je n’avais pas le choix ».

« Je ne suis qu’une vieille bûche vermoulue et pourrie, gisant sur le rivage du temps ».

Bestial  par la crudité de certains passages, l’urine comme remède universel, sensuel par le paralléle entre les seins lourds d’Helga  et la rondeur des brebis, la douceur de la peu d’Helga et la toison des brebis.

 « Je me suis couchée dans l’herbe entre les mamelons d’Helga » « j’étais en train de palper les femelles pour voir si elles étaient bien en chair. C’est toi que je voyais … et ces protubérances étaient si exquises que j’eus l’impression d’avoir à nouveau les mains emplies à éclater par tes doux mamelons. » 

Beaucoup de poésie et de profondeur  souligné par Dominique. « croire au progrès et se l‘approprier est une chose, mais c’en est une autre que de mépriser le passé »… c’est quand les gens tournent le dos à leur histoire qu’ils deviennent tout petits ».

L’auteur Bergsveinn Birgisson est né en 1971. Titulaire d’un doctorat en littérature médiévale scandinave, il porte la mémoire des histoires que lui racontait son grand-père, lui-même fermier et pêcheur dans le nord-ouest de l’Islande. Immense succès dans les pays scandinaves ainsi qu’en Allemagne, puis en France, la Lettre à Helga a été édité aux Editions Zulma.