« Les Graciées » Kiran Millwood Hargrave

with Aucun commentaire
Les Graciées

Intrigue

Le livre « Les graciées » présente un cas historique : la chasse aux sorcières dans l’île de Vardo au XVII° Siècle. Cet évènement a donné lieu à une installation par Louise Bourgeois et Peter Zumhort dans l’île de Vardo. Mais le livre est une reconstitution littéraire.

Le récit commence par une terrible tempête qui va noyer tous les bateaux de pêche, principale activité de l’île, et faire mourir tous les hommes de l’île, sauf un : le pasteur.

Devant cette situation, une femme, Kirsten, prend les choses en main. Elle incite toutes les femmes à s’embarquer dans les bateaux restés à quai et ramener le plus de poissons possibles. Le poisson étant la principale nourriture de l’île elles auront ainsi de quoi se nourrir. Beaucoup de femmes la suivent mais un certain nombre de dévotes obéissent au pasteur opposé à ce projet. Au long du livre, pour décrire ce que vont vivre les habitantes de l’île, l’autrice met en scène une de celles-ci, Maren, elle en devient la protagoniste principale. Nous aurons la description de sa famille ; sa mère, surtout sa belle sœur, une Sami (une « lapone »). L’autrice s’attarde aussi sur les techniques domestiques de la famille, le rôle des peaux de renne comme ameublement. Mais aussi le caractère hors norme chrétienne de la belle sœur Diina, la Sami.

Un jour le pasteur annonce l’arrivée du délégué missionné par le  seigneur de Vardo, M. Cornet. Dans l’ordre de mission il doit venir de Trondheim en passant par Bergen où il doit prendre femme. Il choisira Ursa, que son père lui vend en quelque sorte et sera un personnage important du livre.

Cependant, sous l’impulsion de Kirsten, les habitantes de l’île apprêtent un hangar pour loger le délégué. Mais sa réputation le précède : on sait que dans certains endroits, il s’est chargé de débusquer et de faire exécuter des sorcières.

Suivent des épisodes montrant l’ambition de M. Cornet, sa déception de ne pas habiter le fort de l’île, et son zèle à recueillir des anecdotes montrant, chez certains habitants, des mœurs datant d’avant l’introduction du christianisme.

[à la relecture je m’aperçois, ayant entre temps lu le livre de Carlo Ginzburg Le Sabbat des sorcières, que Kiran Millwood Hargrave sème, comme un petit poucet, au long de son récit sur les habitants de l’île, des indices montrant plusieurs traits considérés depuis le XIVème Siècle ceux de la sorcellerie]

 Ursa est guidée par  Maren pour ce qui est du travail domestique et l’arrangement des maisons. Cependant que le village se divise en deux,  fortes de l’arrivée du délégué puis du seigneur, les dévotes commencent à accuser Kirsten de sorcellerie ainsi que Diina.

Cette dernière n’attend pas et s’enfuit avec son fils au pays des Sami

Enfin les arrestations commencent avec l’arrivée du seigneur de l’île. Kirsten et une dame qui avait des sculptures de runes sont les premières arrêtées. Des soldats entrent dans les maisons pour brûler lits et autres mobiliers qui auraient appartenu à de potentielles sorcières et, sauf les dévotes, les femmes du village sont soupçonnées de l’être.  Kirsten est brûlée après avoir été jetée à l’eau pour savoir si elle est endiablée. Enfin Cornet, qui ne supporte pas que sa femme Ursa soit amie d’une femme locale, accuse Maren de l’’avoir ensorcelée. Il se jette sur elle pour l’étrangler. Ursa prend une  chaise et la fracasse sur le dos de son mari, puis lui fracasse le crâne avec un pilon.

Maren l’invite à rentrer chez elle, puis emporte les affaires qui pourraient la compromettre, dont une robe jaune, et se jette dans la mer,  les poches remplies de suffisamment de poids pour ne pas flotter une fois morte.

La discussion

La plupart des membres du cercle ont bien aimé le livre, le trouvant intéressant et loin des lectures précédentes. Quand on n’a moins apprécié la lecture, le reproche allait du style d’écriture, jugé plat, au récit trop feuilletonnesque et anachronique, la relation entre Ursa et Maren trop dans l’air du temps présent.

Quand, par contre, on a aimé sa lecture, on salue la façon dont l’autrice distille la menace qui pèse sur les habitantes de l’île et  la façon dont les conditions matérielles sont décrites, quoique souvent avec trop de détails ou de longueurs.

La violence des rapports homme-femme et des relations de pouvoir, le contraste entre le caractère horizontal des relations dans le village et entre Maren et Ursa et la brutalité des puissants ont été soulignés.

 Quelques-uns d’entre nous  ont goûté les descriptions des paysages,  alors que d’autres reprochent à l’autrice ,  lors du voyage d’Ursa, de négliger la splendeur de certains d’entre eux. Ainsi que d’avoir supposé les maisons en bois, alors qu’à des endroits si proches du pôle nord il n’y a pas de forêts. En somme, au nom du réalisme, ils n’ont pas apprécié les écarts géographiques ou historiques de Kiran Millwood Hargrave.

Certains ont fait part de lectures sur la chasse aux sorcières qui permettraient à de nouveaux lecteurs de mieux approfondir la question avant la lecture des Graciées.

Répondre