« L’ombre du condor » J.P. Delfino

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Après « la passagère du silence », un roman autobiographique et historique qui se passe en Chine sous une dictature, nous voilà repartis en sens inverse, vers l’ouest, pour un roman imaginaire et historique qui a lieu au Brésil , l’arrivée d’une dictature !
           Delfino est un amoureux du Brésil, il écrit avec passion et fait passer les sensations brésiliennes !  Il présente un livre à charges, très orienté où il dénonce la politique hégémonique des USA menée pas la CIA. A travers la narration et la progression de la vie des 4 personnages essentiels (Zumbi, Jao, Lucina et Paulino), pris par les différents évènements, l’auteur utilise ce côté romanesque pour que le lecteur puisse entrer dans l’aspect historique et politique de l’histoire récente du Brésil, avant 1964 et pendant 1964, la révolution étouffée. Cet aspect de mélange de réalité-fiction permet de mieux supporter l’horreur des comportements de certains humains et les atrocités des tortures décrites avec beaucoup de violence, « too much » et trop manichéen pour certains, nécessaires à dénoncer pour d’autres !
           Un roman dont le prétexte est politique : un bon documentaire mais malheureusement l’aspect romancé est raté car les personnages sont trop caricaturaux. Même si ce contexte historique est parfois un peu long, il fixe l’histoire et permet d’échanger sur la torture, comment un homme, au besoin de se valoriser, de gagner de l’argent, se laisse entraîner, formater et est sous emprise de ses supérieurs ! Où est la conscience de certains individus ? Jusqu’où peuvent-ils aller ? Même si de nombreux livres dénoncent tous ces actes sauvages et barbares que l’on sait avoir lieu dans les guerres, celui-ci a le mérite de bien décrire avec réalité toute cette période, de dévoiler avec précision tous ces actes odieux, de révéler les purges, les tortures ! Avec, en dernière page, des informations complémentaires et des dates précises, à partir de 1944, sur les interventions américaines en Amérique latine.
           Bien sûr que les USA ne sont pas tout blanc ou tout noir, mais par ce roman l’auteur dénonce leur comportement vis à vis de l’Amérique latine et particulièrement ce qui s’est passé au Brésil en 1964, vouloir s’approprier leur richesse, éliminer le communisme, les gauchistes, interdire les grèves, les syndicats et pratiquer une politique de conquérant !
           Pour certains se réapproprier cette période est nécessaire et même si la caricature des personnages dérange, elle permet de supporter les horreurs décrites et subies, de dévoiler la difficulté de la vie des gens, leurs rencontres et le parcours de Lucina, femme belle, noire, révolutionnaire, passionnée que rien n’arrête !
           La première page, Blaise Cendrars écrit en 1938 : « le 21ème siècle sera le siècle de l’Amérique latine… » un destin extraordinaire prédit, puis 1964, et voilà ce qu’il en est !
           Le prologue fait un parallèle entre l’importance du foot et la passion brésilienne avec la perte du match en 1950 qui entraîne un sentiment de grisaille puis la révolution du peuple passionné en 1964 qui aboutit à l’arrivée des généraux, l’échec entraînant lui aussi une sacrée grisaille !
           Le premier chapitre est intéressant car l’auteur révèle le Brésil avant 1964 et tous les éléments développés par la suite y sont suggérés : l’amitié entre les 2 pères (un blanc, un noir), copinage, connivence, soutien et entraide ; le mensonge, la malignité et le désir de briller avec la compromission chez Paulino  ; l’importance de la musique, de la danse (samba, carioca) ; les Brésiliens ont leur propre musique et ne veulent pas de l’américanisation de la musique ; la passion de Lucina pour la politique et son besoin de comprendre qui mène le monde, pourquoi et comment ; l’humiliation, la honte et la colère symbolisées par les femmes américaines qui veulent photographier Zumbi pour le montrer à leurs amies américaines ; l’importance de l’alcool, de la bière et des cigarettes ; le besoin de monter des coups qui rapportent ; la crédulité et naïveté de certains ; la recherche de la liberté.

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