« Vider les lieux » Olivier Rolin

with Aucun commentaire

« Le démontage de mon appartement va être une invitation au voyage »

Faut-il avoir déménagé pour être particulièrement sensible à ce roman à la fois  différent de ceux auxquels Olivier Rolin nous a habitué mais aussi qui les rassemble tous. Car ici on voyage beaucoup, on parcourt la planète d’une page à l’autre, les souvenirs se ramassent à la pelle.

 « Donc on s’en va. On est sommé de vider les lieux, de déguerpir, on quitte cette rue qui a cessé depuis bien longtemps d’être la grand rue du village des lettres, la passerelle entre les langues française et anglaise… mais pour être honnête ce qui me vient à l’esprit c’est comment comme réussir à faire disparaitre ce fucking bazar ? entassement de livres, papiers, photos, objets, ….  Environnement rassurant ?

Tout est dit en ces quelques lignes : le propriétaire/ Editeur qui a pris soin de le virer avant un changement de loui renforçant les droits des personnes âgées,  ne pas regretter La rue de l’Odéon, cette rue mythique qui a un peu perdu son âme, mais surtout la hantise de savoir que faire des mille objets entassés dans un lieu où on a passé la moitié de sa vie : objets, courriers, et surtout les milliers de livres ; ces objets qui nous encombrent , font partie de nos vies car ils racontent ce que nous fûmes, ils nous rassurent.

Déménager c’est faire des choix : se débarrasser ou pas de ce qui est nous est familier,

« On peut se demander pourquoi on s’encombre de ces objets qui n’ont en général aucune beauté ? collection ? mais non sur le moment ces prélèvements nous semblent significatifs  mais très vite ils perdent leur pouvoir d’évocation …  herbier que revêt la poussière. Il faut qu’arrive le jour où on doit les soumettre à leur jugement dernier – jeter pas jeter – pour qu’ils reprennent une sorte de vie.

Déménager c’est redécouvrir tout ce qui est inutile puisqu’oublié, faire remonter à la surface les mille petits moments de nos vies. Et Olivier Rolin n’en manque pas, lui qui fut ou est toujours un voyageur infatigable, qui a croisé tant de lieux, fait tant de rencontres.

Pour quelqu’un qui se revendique avec une mémoire défaillante, les souvenirs sont bien là, présents.

 Il ne manque pas non plus d’autodérision. Il relate pour notre plus plaisir les lettres d’admiratrices reçues, les rencontres d’une vie ou d’un soir, celle d’Antonio Lobo Antunes et de Bioy Casares sont particulièrement savoureuses, de ses ex. L’évocation de son voisin coiffeur Luc ou le café du coin satisfont nos besoins de ragots mondains. On y découvre les écrivains, poètes aimés qui l’ont inspiré : Montaigne, Tchekhov, Giono, Rimbaud, Sabato ….

Vider les lieux est le titre particulièrement évocateur qui convient car ne dit-on pas que partir c’est mourir un peu.

J’ai quitté à regret cet ouvrage empreint de nostalgie et ce fut un moment de lecture délicieux.

Répondre